242 - BIBLIOTHÉRAPIE

En ces temps confus où repères et curseurs se tirent à vitesse grand V, où les politiques ne pensent qu’élections, où les militants clairsemés s’escriment sur mille causes éclatées, où les barbares (que nous avons fabriqués) sont aux portes de nos cités, et où les carambars sont de plus en plus maigres… qu’est-ce qui nous reste pour ne pas sombrer dans la déprime ? S’asseoir en posture de yoga ? S’agenouiller pour prier ? Se dresser pour lever le poing et le drapeau rouge ? Se bourrer d’antidépresseurs ? Se péter à la Kro ou au whisky (selon les moyens) ? Regarder le ciel pour scruter les astres ?

…peut-être le moment d’ouvrir un bon bouquin ? JK

 

A l’heure du tout-écran et des informations à digérer sans cesse, la lecture apparaît comme un temps pour soi. Favorisant l’interprétation, la lecture d’un ouvrage aide à sortir de l’enfermement, à ouvrir de nouveaux horizons, pour se réinventer au travers de la dynamique d’un autre langage.

Dans Bibliothérapie, Lire c’est guérir (Points, 2008), Marc-Alain Ouaknin place la lecture au sommet des démarches qui fondent l’être humain. De son côté, Régine Detambel, dans Les livres prennent soin de nous (Actes Sud, 163 pages, 11,95 euros), souligne les pouvoirs thérapeutiques du livre en s’appuyant sur les travaux de la recherche universitaire en « bibliothérapie », un moyen de résoudre des problèmes personnels par l’intermédiaire d’une lecture dirigée.livre

Intellectuelle et sensible

Mais devant les rayons surchargés, que choisir de lire ? Se plonger dans des traités d’ordre professionnel ou des essais sociologiques, philosophiques, politiques ? Prendre le chemin du développement personnel grâce à la multitude d’ouvrages donnant les clefs du savoir sur soi ? Ou préférer le roman, habité de personnages imaginaires incarnant autant de vies possibles pour le lecteur et lançant un dialogue identificatoire avec un alter ego ?

Expérience à la fois intellectuelle et sensible, sorte de guide autorisant à penser autrement, divers types de lectures fortifient l’humain. Mais, à en croire les travaux de chercheurs en bibliothérapie, le roman arrive en tête des lectures pourvoyeuses de bien-être psychologique, voire carrément réparateur.

Tout à la fois expérience d’éveil et accès à la connaissance, remède aux ruminations diverses, échappatoire à l’angoisse et la tristesse, voyage dans un ailleurs, le roman agit comme un fortifiant psychique. Ce que Montesquieu avait déjà fort bien résumé : « Je n’ai jamais eu de chagrin qu’une heure de lecture n’ait dissipé. »

         Sophie Péters (Le Monde)