260 - Inculture, obscurantisme et bien-pensance

            Excusez ce titre quasi-pléonasmique, mais je m'en vais vous narrer. Vous narrer quoi ? Vous narrer tout court.

Voilà : alors il se trouve qu'en ce moment, j'expose quelques créations à prétention artistique, consensuelles et anodines, puisqu'il s'agit de miroirs (certes ils sont splendides et pas du tout banals...), dans un restaurant. Et voilà t-y pas que l'envie me prend d'y adjoindre ma plus récente oeuvrette, « Conformisme », que vous avez déjà pu voir sur ce blog.(article 236)

conform 2
 

 C'est complètement hors contexte, j'avoue, mais c'était juste pour le clin d'oeil.

Normalement, les gens qui la voient et qui lisent l'intégralité du sous-titre se marrent, rigolent, ou pour les plus obtus, se frappent plus ou moins discrètement la tempe avec leur index. C'est rigolo, un spermatozoïde qui soulève son chapeau et qui dit : « Bonjour Madame, puis-je entrer ? »

Eh ben là, non !

Y fallait que je tombe sur un hermétique ! Et pis un gratiné !

Il se trouve qu'un client dudit restau, journaliste à Arte de son état, a été terriblement choqué par la vue de l'ovule, symbolisé par la grenade. Ou plutôt, non ! Il a été affreusement traumatisé par la grenade qui représente l'ovule. Ce serait paraît-il, « violent » !

Evidemment que c'est violent, une grenade ! C'est du métal prévu pour exploser en fragments destinés à tuer, mutiler ou à blesser, principe repris par les fous d'Allah qui se font joyeusement sauter en se ceinturant de boulons. La France fabrique des grenades, la plupart des autres pays aussi, c'est un truc simplissime à réaliser, à la portée de n'importe quel bricoleur un peu doué.

En plus, cette grenade en particulier a une histoire, c'est celle que mon papy trimballait dans ses poches pendant l'occupation. Pendant quatre ans, à chaque fois qu'il changeait de fringues, il transférait l'objet. Y faisait gaffe à pas l'oublier au fond de ses fouilles, des fois que ma grand-mère la mette dans la lessiveuse. Mon papy, c'était un terroriste du point de vue des Allemands et de la police française de Vichy qui représentaient la Loi et l'Ordre, et un beau jour, il a eu sa carte de résistant et c'est devenu un genre de héros. Alors qu'il n'a jamais changé ses idéaux.

C'est bizarre, la vie...

Alors le journaliste de Arte, je suppose que c'est un gars qui a reçu de l'éducation et des diplômes, qu'il est probablement de gauche modérée, qu'il s'auto-proclame tolérant, humaniste et tout le tintouin, mais il ne supporte pas la vue de ce genre d'objets guerriers, même en détournement artistique. Quelle étroitesse ! En plus, il était en Centre-Bretagne pour faire un reportage sur les filières bio. On pouvait s'attendre à une certaine ouverture d'esprit. Eh ben non !

Que n'a-t-il pas vu, tout à son aveuglement ?

Il n'a pas vu le second degré. Il n'a pas vu le symbole. Il ne sait pas que l'acte sexuel est violent, parfois même traumatisant pour l'homme, quand le pénis captif est mâchouillé par le vagin goulu. Il ne sait pas, ou alors il occulte, que la surnatalité est une violence faite à la Terre, que l'ovule est une cellule à fragmentation, une bombe à retardement, que le petit humanoïde qui va naître est potentiellement violent lui aussi, comme tous ses congénères. L'a pas vu ! L'a pô compris ! L'a été choqué ! Ça y a coupé l'appétit !

Bon, OK, j'admets, c'est un restau, c'est pas une galerie d'art, on n'y va pas pour polémiquer, on y va pour manger. C'est une erreur de positionnement de ma part.

Mais la police de l'esprit est décidément partout, et le journaliste est un homme de pouvoir. Il n'informe pas, il nous dit quoi penser et comment. Peut-être que son papy à lui, au journaliste de Arte, il travaillait à Radio-Paris ou Radio-Berlin pendant la guerre, et qu'il trouvait déjà que les grenades, ça faisait désordre...

Manquerait plus que le rédacteur d'un journal sportif fasse un scandale à cause du détournement des freins de vélo en spermatozoïdes... Les freins ! Un élément essentiel à la sécurité ! On ne plaisante pas avec la... sécurité !

Du coup, comme l'installation a été retirée de la vue du public pour ne froisser les susceptibilités de personne, je vais aller jusqu'au bout de l'auto-censure et l'enlever. Et je vais y rajouter un petit noeu-noeud rose pour dédramatiser. Ça ira comme ça ?

Ah la la la la, on vit une drôle d'époque...

 

PS. Tiens, si ça vous dit, on va faire un petit sondage, amis lecteurs anonymes. Si vous avez quelques minutes à perdre, pourquoi ne feriez-vous pas remonter votre avis ?

L'installation « Conformisme », est-elle :

A – amusante

B – choquante, violente, horrible, à retirer de ma vue, etc...

C – nulle et sans intérêt

D – autre (préciser).

Merci de nous faire parvenir votre réponse avant le 31 / 12 / 2015 minuit.

Knoppy

 

COMMENTAIRES

-Je ne suis pas surprise de vous savoir censuré Docteur K. Je dirais même tant mieux c'est bien fait. Et je dirais même plus, réjouissez-vous ! La censure ça se mérite ! La censure se savoure. La censure se déguste. Les artistes libérés ont quasiment disparu. Evidemment, quand on fait dans la création sous contraintes, par exemple quand on repeint des cochons pour la FNSEA ou quand on fait plaisir au Conseil Régional qui nous donne des fonds qu'on appelle des subventions, et demande à voir le projet, tout ça ... Quand on fait dans le politiquement correct, l'insipide, le fadasse, quand on fait dans la bienveillante neutralité le sans odeur, tout ça ... On fait de la merde parfumée qui plait à tout l'monde, on sert la soupe aux mécènes, on ne prend aucun risque, tout l'monde est bien content, personne ne se triture les méninges. On fait dans l'accessible ! Tout le monde comprend, surtout quand y a aucun message derrière. Mais quand on fait dans le drôle, voire le glaçant, le subversif, alors là tout de suite, il faut s'attendre à être contredit ! Surtout contredit par ceux qui n'ont pas accès au second degré ! Il faut de la subtilité pour accéder au second degré. Il faut de la finesse, il faut avoir un bon sens de l'humour et de la dérision. Il faut quitter ses semelles à crampons. Larguer ses certitudes ses vieux caleçons ses références, il faut de la légèreté, de la souplesse, du latex pour quitter son costume trois pièces et sa boîte de gâteaux de pâtisserie du dimanche après la messe. Faut abandonner la confesse. Il faut se dénuder de ses diplômes et ses titres honorifiques et de ses médailles et légions d'honneur ...

Ah il faut du tact, de la classe pour abandonner toute sa quincaillerie ! Il faut de l'élégance pour ne pas tomber dans la sauvagerie facile de la censure !

Bref il faut de l'imagination et côtoyer la  volupté ... Ce qui visiblement n'était pas le cas hélas, de ce susceptible triste sire d'Arte. Votre ovule pour ma part, tout fracassant qu'il soit,  m'a fait penser à la tour ronde du quartier latin de Copenhague, très visitée, quant à la politesse du spermato en chapeau, je ne doute pas qu'elle reflète la réalité du terrain in utéro. Les femmes sans freins depuis toujours, adorent qu'on leur tienne la porte avant d'entrer, je vous le confirme.

Cependant voyez, mon cher Docteur K, compte tenu de votre interprétation toute masculine de l'acte sexuel, qui comme vous l'affirmez, peut être violent, voire traumatisant pour l'homme, ce que je conçois parfaitement en tant que femme, je vous invite cependant, en tant que deuxième sexe, à imaginer ce qu'éprouve une boîte aux lettres chaque fois qu'on lui glisse dans la fente, un journal roulé sans lui demander son avis, toute presse confondue. Je ne doute pas qu'en cherchant bien, nous trouverions vous comme moi, de récentes études américaines à ce sujet ! Mais, si nous voulons mener une contre enquête, il faudra faire vite, car les boîtes aux lettres n'en ont plus pour longtemps puisque déjà, quasiment tout se fait par internet ! 

Ce qui m'amène à vous dire, Docteur, oubliez la censure et acceptez ce conseil avisé, même si vous ne connaissez pas la gloire de votre vivant, gardez précieusement votre oeuvre intitulée CONFORMISME ( qu'on aurait pu sous titrer " La création du monde " selon Knopp ), elle aura plus de sens dans pas longtemps quand la procréation sera devenue 100% artificielle, à cette heure là, vous aurez toutes les chances de faire un tabac, au moins auprès de la filière bio. Bien à vous, ami créateur. Iso

-Yogolo ma cousine !

Que j'aime votre belle prose, et pas seulement quand nous nous accordons.

Ah-ah, effectivement, concernant la violence de l'acte sexuel, j'ai décidé (unilatéralement !) de passer sous silence le point de vue féminin et le cliché rebattu du traumatisme de la pénétration, car pour ma part, je me suis toujours assuré du consentement de la boîte aux lettres. Et pis on n'est pas là pour faire perdurer les poncifs, faut innover ! Ceci dit, j'aime assez l'image de la verge-chouine-gomme qui serait mâchonnée et mastiquée, qu'on en ferait une grosse bu-bulle ( paf !) et qui finirait collée sous une table.

Merci pour vos conseils finaux et avisés, je m'en vais planquer mon conformisme encore pour quelque temps.Gronk !

Knopy

-Ah ah ah mon cher Knoppy, la verge Hollywood ! L'homme se positionnant en victime, et non plus en missionnaire ! Attention quand même, faut faire gaffe avec les points de détail, tu vas encore heurter la sensibilité du public. L'homme chewingum, ça c'est un truc des créationnistes ! Encore à cause de la mère Eve qu'a obligé le père Adam à croquer une pomme d'amour à la fête foraine et depuis hop c'est la kermesse à tous les étages ! Oh les filles oh les filles, palapalapala elles nous rendent marteau ... Je dois dire que symboliquement, le chewingum, que ce soit un malabar ou un autre ... A bien y regarder ... Il a colonisé la planète !

On dirait bien que quel que soit le sujet abordé, se cache toujours le même rêve d'extension à l'infini à tous les niveaux ! La faute au capitalisme, non ?

Le sexe, féminin ou masculin, ça finit toujours par une histoire de croissance de toute façon ! Croissance par ci croissance par là, même en période de crise ça n'arrête pas. Remarquez toutefois, que l'ex-croissance collée sous la table comme un vulgaire bubble gum ... cela en dit long sur votre niveau de réflexion rapport aux régionales, sachant que nous atteignons là, au moins le troisième degré voire le quatrième, y va plus nous rester grand monde, à part les décroissants.

Iso