...à périodicité très variable, ouverte le 23 février de l'an de grâces (matinée) 2014...

et (presque) fermé en janvier 2017


sphinx

PRÉ EN BULLE
Cette page n'est subventionnée par aucune collectivité territoriale,
car nous détestons la littérature de faussaires à la main d'organismes bidons ( Offices, fausses assos, EPCC...), instrumentalisés en sous main par des élus.
Quand, par le passé, les gouvernants, ou leurs porte-plumes serviles, se sont occupés de régenter art ou littérature, on a aussitôt
pu constater la régression mentale.


(avec la complicité de Léonor Fini, ici à droite)

Le mot "Bretagne" de ce titre n'implique aucune allégeance à un quelconque communautarisme, autonomisme ou indépendantisme. Il situe juste le lieu de la culture (et parfois de la langue) d'où nous écrivons. Notre regard essaie de porter plus loin que les Régions, les États, les continents... ou les galaxies, car nos territoires sont avant tout imaginés.

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On n'est pas à un jour près, ni à un mois.
On prend le temps, avant d'écrire, de tourner 7 fois la plume dans l'encrier des sentiments. On amène ses crayons de couleur, on s'écoute, o
n se cause et on se contredit courtoisement. Pour vos plaidoyers en faveurs du Front National, du pâté Hénaff, de la Légion étrangère, de l'Institut de Locarn, ou de l'agriculture productiviste, adressez plutôt vos textes à Minute ou à La France Agricole.

Depuis fin février 2014, sur cette page, déjà près de 400 articles (tous en ligne). Pour faciliter leur repérage, ils sont numérotés. Le moteur de recherche interne vous permet de trouver les thèmes abordés ou les personnes citées.

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À lire acheter les yeux fermés

sachernormal

pour lire quelques pages et commander (13€) :

http://www.jacquesflamenteditions.com/215-la-chambre-rouge-de-lhotel-sacher/

 « Elle était une femme de mots, je serais sa fille de silence. »
Teresa Stern était une étoile.
Adulée, flamboyante, elle a brillé sur la scène de tous les théâtres du monde et voué sa vie à son rêve de gloire.
Mais comment être la fille de cette femme-là ? Comment exister dans son ombre ?
De la Mala Strana de Prague où vécut sa mère enfant, jusqu’aux landes girondines où elle connut elle-même l’amour et l’abandon, la narratrice cherche et se souvient.
Et les gémissements des grands pins landais consumés par les vents de terre se mêlent au doux clapot de la Vltava, emportée vers son destin de mer…

 

Mi-Bordelaise, mi-Slovaque, Marie Pontacq a été professeur de Lettres avant de partir pour l’Inde où elle a vécu dix ans, créant avec son compagnon une librairie toujours en activité près de Pondichéry, Freeland Bookshop.
Installée aujourd’hui en Bretagne, elle travaille dans la traduction littéraire.

L'hôtel Sacher est un palace viennois situé à proximité de l'opéra national. Construit à l'emplacement où deux siècles auparavant a vécu Vivaldi, il est fondé en 1876 par Eduard Sacher comme maison meublée. Sa veuve Anna Sacher en fit l'un des hôtels les plus raffinés du monde, rendez-vous de l'aristocratie et des diplomates.

 

 

esperancevie

Il y a encore une huitaine de jours, les stats me gratifiaient magnanimement d’une espérance de vie de 79,3 années.

Patatras, en début de semaine, les statistiques 2015 sont tombées : plus que 78,9 KO d’espérance à mon disque dur avant la fin de mon contrat à durée déterminée ! (85 ans pour les veinardes de femmes). Du jamais vu !

Sans doute un coup du patronat ou de Macron voulant tout contrôler !

Alors que, depuis 50 ans, on grignotait une petite moyenne de 3 mois de sursis chaque année sur notre congé sans solde, voilà que la régression s’invite du côté des corbillards.

Et les spécialistes de spéculer sur les causes... de la grippe à la natalité en passant par les caprices de la météo.

L’agronome Claude Aubert nous l’avait pourtant prédit dès 2006 ( « L’espérance de vie, la fin des illusions ») : la génération née pendant les 30 glorieuses, celle qui commence à nourrir les croquemorts, « a pris de plein fouet la pollution et l’industrialisation de l’alimentation ». Cette régression s’annoncerait donc durable. On verra l'an prochain !

Un bonne bière pour se remettre de ce mauvais chiffre !

JK

 

 J'étais jeudi à Plérin, dans la salle de réunion de la maison de l'agriculture, parmi les bonnets roses.

Le regroupement parti de la base, des producteurs de porcs laminés par la baisse des cours depuis des semaines. J'étais parmi ceux avec qui j'ai grandi. J'étais parmi des hommes et des femmes trahis par des représentants qui les ont abandonnés depuis longtemps, bons serviteurs des intérêts de la grande industrie. Humiliée par le mépris du Président de la COOPERL venu sans complexes vendre sa meilleure soupe, pareil pour le représentant du CRP le comité régional porcin ... Humiliée par le représentant d'UNICOPA qui n'avait d'autre discours que " Tout ça c'est de la faute des écolos " et " L'avenir c'est la Chine ". Humiliée par le représentant de la FNSEA qui s'était couché tard la veille, le pauvre, pour assister à Paris, aux voeux de Ségolène Royal et toper un représentant du ministère sur les dernières normes d'épandage. Alors qu'elles sont validées par Xavier BEULIN copain comme cochon avec les rentiers de la certification. La normalisation est une véritable industrie. Il faut l'alimenter. Nous sommes en bureaucratie, il faut lui fournir du boulot. Industries et certificateurs sont complémentaires, ils se nourrissent des nouvelles règles qui leur profitent, en contrepartie des suicides, du surendettement et des plans de licenciements ... Alors, tant qu'on les laisse faire. Personne n'a osé évoquer à qui profite le crime, je n'ai pas entendu parler de SOFIPROTEOL du groupe AVRIL de TERRENA ou TRISKALIA des banques associées ou des assurances etc ... Peut être que c'était pas le lieu ou pas l'heure ou l'endroit ?plerin rose

 Nous étions là en tout cas, dans un monde à deux vitesses. Dans deux réalités d'où personne ne pouvait s'extraire. Un monde d'hommes en cravate, formatés au discours de la grande industrie. Serviteurs des pieuvres à l'appétit immodéré qui osent encore porter le nom de coopérative sans avoir honte. Leurs arguments étaient tellement hors sol, que c'était à se demander s'ils n'avaient pas subi un lavage de cerveau. Quand les pieds ne touchent plus par terre, de toute façon les raisonnements sonnent faux. En même temps, à les voir, on les sentait à mille lieux des réalités du terrain et leur impuissance et leur faiblesse étaient palpables, au point qu'elles les rendaient tout simplement humains. Ils étaient les minuscules rouages de l'énorme machine. Ils jouaient leur rôle comme au théâtre, mais au fond d'eux, y croyaient-ils encore eux mêmes ? On aurait dit d'un côté, un monde d'officiers rapportant les discours de leurs généraux. Ils étaient bien installés en haut de la colline, observant la bataille à la longue vue, leur solde confortable versée à bonne date. Leur uniforme était de qualité. Leurs bottes bien cirées. Leur retraite en cours de calculs très favorables, avec de jolies médailles à la clef pour faits d'armes et bravoure, et surtout pour avoir dit AMEN à chaque réduction d'effectif décidée par filière, entre eux, au nom de la fatalité. Rien d'autre que les représentants de commerce des structures, coopératives industrielles, syndicats patronaux, grande distribution et structures administratives et politiques.

En face, il y avait les bons soldats de la France Agricole, qui avaient respecté depuis des décennies les plans de bataille à la lettre, avec une confiance aveugle, et une obéissance incroyablement exemplaire. En même temps, on avait en tête les noms parus dans les obsèques de ceux qui étaient tombés pour la gloire. Ceux qui étaient là n'avaient même plus de quoi se payer un casque, ils portaient un bonnet rose. Et puis, il y avait leurs femmes, et leurs filles. Ils étaient 10 millions en 1945, quand ils faisaient la fierté du pays. 10 millions disparus. Ils seraient aujourd'hui au bas mot 500 000 paysans actifs dans nos campagnes désertées, pour nourrir des banlieues surpeuplées. Hier, ils étaient un millier regroupé à Plérin. Ils parlaient juste. Ils disaient vrai. Ils disaient " Ayez au moins la dignité de partir, vous incarnez l'immobilisme et l'échec de la profession ... " Du côté des soldats, les prises de parole étaient tellement sincères que tous les yeux brillaient. La parole était désespérée pour certains. Je me sentais des leurs. On aurait pu voir les choses autrement et voir d'un côté, les prisonniers et de l'autre les gardiens de prisons, sachant qu'on se posait tous une question : lesquels ont-ils le plus besoin des autres ?

cochonsrosesJ'étais au coeur d'une rencontre d'humanité qui ressemblait à une explosion. L'analyse de la situation était d'une complexité inextricable et la réalité limpide : " Si le cours ne remonte pas on crève. On met tous la clef sous la porte. De toute façon vous nous avez menottés. Vous nous avez menti. On n'est plus libre de rien. Mais aujourd'hui une chose est sûre on a tous intérêt à rester groupés, fini les quarante groupements qui nous divisaient pour le bien du marché. Si on n'en fait plus qu'un, on sera plus solide ". Un homme courageux à un moment a pris le micro " J'ai pas dormi de la nuit pour vous dire ceci. Ici on a quasiment tous connu des catastrophes sanitaires, des suicides, des pépins de santé, des divorces, quand y a des dettes on se prend la tête et les enfants trinquent. Ceux qui sont ici et travaillent à deux, ils se regardent le soir les yeux dans les yeux en se demandant lequel de leur poste va sauter en premier, comment ils vont vivre et s'en remettre après " Ici en démarrant, on a cru s'engager à nourrir la population. On nous a trompés, c'est au marché qu'on a donné à bouffer. Et vous n'êtes même pas capables d'exiger une étiquette viande française au cas où la population, démocratiquement, voudrait encore reconnaître qu'elle vote à chaque fois qu'elle mange et qu'elle peut nous aider en achetant nos produits "...

 Les discussions auraient pu durer des heures. On était au coeur de la crise de la marchandise où les producteurs sont vampirisés, et les consommateurs pas informés. On était tous DEDANS mais tous CONTRE et personne n'était dupe, c'était une avancée. Plus personne ne voulait jouer son rôle sagement. Il y avait des milliers de choses à faire. Oui, mais par où commencer ?

Je suis rentrée chez moi les larmes aux yeux, en me disant, nos agriculteurs, nos artisans et nos petits commerçants sont les derniers indiens. Sans eux, mon pays ne ressemblera plus à rien, à rien qu' à une succursale du folklore américain. On ne peut pas les regarder partir sans rien faire, on va trouver des solutions pour leur donner un coup de main. SEF je pensais que leur slogan était bien trouvé SEF Sauvons l'Elevage Français Oui, mais par où commencer ?

J'oubliais que j'étais à cause de tous ces mensonges devenue quasiment végétarienne, et que je défendais le BIO ... J'oubliais mes propres contradictions.

Iso

 

Comme Moulinex, Lybrido libère la femme

Il était important de commencer l'année par une excellente nouvelle. Elle est toute nouvelle et se vend par boîte de trente, enveloppée d'une fine pellicule de menthe à ce qu'il paraît. Très subtile. En faisant preuve d'un peu d'imagination, les labos auraient même pu lui donner l'apparence d'un bonbon Mentos ou d'une pastille Vichy, mais cela aurait pu porter à confusion ! Elle s'appelle LYBRIDO, c'est une américaine ! Rien qu'en le disant, on entend bien que toute relation avec un mot déjà existant n'est absolument pas fortuite. Evidemment elle est rose, et c'est pour nous les filles, youpi, une de plus ! Enfin, non, pardon, pas pour toutes les filles hélas, elle est réservée aux filles non ménauposées. C'est pas de sa faute, elle est à base de viagra et de testostérone, alors voyez. On avait déjà la pillule anticontraception. La pillule d'avant. La pillule du jour. La pillule d'après. Passons à la pillule pendant, on n'était plus à ça près.arbre

LYBRIDO mais pourquoi ils ont mis un R vous direz-vous, même si vous n'êtes pas blonde ? Je pense que c'est pour ne pas embarrasser le pharmacien ! Bonjour Madame que vous faudra-t-il aujourd'hui ? Deux boîtes de LIBIDO s'il vous plaît ! Silence gêné dans la pharmacie, agression possible à la sortie... On n'est jamais trop prudent. Le R ici est un principe de pécaution, on l'entend bien ! Ce qui n'empêche pas la chanson du mot de faire TILT dans l'inconscient collectif. Et l'idée de cheminer tranquillement en tout un chacun. Heu pardon, deux boîtes de LYBRIDO merci ! Il faut à n'en pas douter avoir fait plusieurs années d'études en marketing, pour avoir inventé pareille appellation aussi suggestive et discrète à la fois ! Quelle trouvaille. Je me demandais pour aller dans le même sens, pourquoi on n'avait pas donné au VIAGRA un nom plus éloquent genre ERECTRIC...

Alors, pour ceux qui voient l'amour comme un sport mécanique, la LYBRIDO est une solution pratique, qui s'adresse aux femmes qui sont en manque d'envies sexuelles, pour accéder au bonheur conforme dans la mondialisation heureuse, voyez. Action réation. Hop un verre d'eau un cachet. A tout problème, une solution. Madame, au bout de 20 ans, vous ne supportez plus la tête de votre conjoint, ses blagues, ni ses odeurs de pieds, ne cherchez plus. L'amour est dans le pré, mais si, le temps ne fait rien à l'affaire ! Vous souffrez simplement d'un trouble physiologique. Don't panic Madame, chez la femme c'est physiologique. Cela vient chez nous d'un désordre, d'une agitation, d'une confusion mentale si vous voulez. Ah non non non, chez l'homme c'est pas pareil, c'est un problème physique. Un dysfonctionnement si vous préférez ! Mais si, vous savez bien, la bourse s'effondre, un train déraille, un tunnel s'enflamme, un pétrolier s'éventre, une centrale nucléaire explose, c'est un dysfonctionnement ! Un simple accident de parcours, un dysfonctionnement quoi ! Vous comprenez ou quoi ?

Donc, côté prescription du ou de la LYBRIDO, forcément comme toujours, les scientifiques se divisent en deux clans. Les POUR et les CONTRE. Les premiers affirmant que la pillule est très efficace, quand les derniers assurent qu'elle ne sert strictement à rien, c'est juste un antidépresseur. Bien entendu, les deux clans s'opposent sur le produit, mais figurez-vous qu'ils se rejoignent sur un principe fondamental. Tenez-vous bien les filles, aux Etats Unis, où la constitution est fondée sur la Bible, le débat porte sur une inquiétude grandissante : " Le risque majeur, si les femmes débordent de libido, c'est bien qu'elles deviennent des infidèles frénétiques et bouleversent l'ordre de toute la société ! De nombreux scientifiques s’inquiètent des deux côtés, craignant que la femme ne devienne sexuellement agressive. " Quelle horreur ! Remarquez, on imagine facilement la suite, les américains mâles qui ont un port d'arme autorisé, vont de toute façon vouloir rester du côté des agresseurs, normal ( sauf quelques uns qui fantasment et les patrons de la grande industrie ). Quant au jour où il en sera question chez nous, on n'aura pas à se tracasser, VALLS brandira le 49.3  ! 

A la lecture de ces articles, je me demandais en souriant, sans avoir l'intention de bouleverser l'ordre de toute la société, si les hommes modernes pensaient encore qu'il y a deux types de femmes sur la terre, celles pour s'amuser, et celles pour faire des enfants... Quand toutes elles réclament, de faire les deux en même temps.

Sainte Iso

NOTRE PRIMAIRE

APPEL AU DEBAT ET POUR UNE PRIMAIRE DES GAUCHES ET DES ECOLOGISTES

Nous refusons la passivité face à l’abstention, au vote Front national et à la droitisation de la société. Nous refusons les renoncements face aux inégalités sociales, à la dégradation environnementale, aux discriminations et à l'affaissement démocratique. Nous refusons la paralysie de nos institutions.

Nous n’acceptons pas que la menace du FN, le risque terroriste et l’état d’urgence permanent servent de prétexte pour refuser de débattre des défis extraordinaires auxquels notre société est confrontée.

Il n’y a pas de fatalité à l’impuissance politique. La France est riche de son énergie vitale et de ses talents qui aspirent à forger un avenir bienveillant.

Nous voulons faire de la prochaine élection présidentielle la conclusion d’un débat approfondi qui est passionnément désiré et attendu dans le pays. Nous voulons du contenu, des idées, des échanges exigeants.

Nous appelons à une grande primaire des gauches et des écologistes.

Notre primaire est la condition sine qua non pour qu’un candidat représente ces forces à l’élection présidentielle en incarnant le projet positif dont la France a besoin pour sortir de l’impasse. Elle est l’opportunité de refonder notre démocratie.

En signant cet appel, je m’engage à voter lors de la primaire des gauches et des écologistes. Je participerai dans la mesure du possible aux débats qui seront organisés pour la nourrir.

Signez et faites signer, pour réanimer le débat politique, pour se réapproprier l’élection présidentielle, pour choisir notre candidat-e !

Initiateurs et premiers signataires :

Julia Cagé (économiste), Dany Cohn-Bendit (européen), Mariette Darrigrand (sémiologue), Marie Desplechin (écrivaine), Guillaume Duval (journaliste), Romain Goupil (cinéaste), Yannick Jadot (député européen), Hervé Le Bras (historien et démographe), Dominique Méda (sociologue), Thomas Piketty (économiste), Michel Wieviorka (sociologue).

Signez la pétition

 

TROP TARD

Un soir chez Yvonne et Tommy, tout en découpant dans un magnifique jambon italien de fines tranches succulentes, Tommy nous raconta l'histoire d'un bègue à la terrasse d'un café.
   

-Le garçon : qu'est-ce que j' vous sers?
   

-Le bègue : Un ca… ca… ca… café puisque j'a… j'a… j'arrive jamais à dire une b… une b… une bière.
   

-Le garçon (rigolard) : Mais vous l'avez dit! Vous venez de dire "bière". Vous voulez une bière?
    troptard

-Le bègue (furieux) : Non, tr… tr… trop tard!
   

Quelques jours plus tôt, Dominique m'avait raconté ceci en rentrant du boulot. C'était au cours d'une séance de travail en lecture avec une fillette de 6 ans rebelle à l'application de toute consigne donnée et ne supportant pas en outre que tout ne soit rempli. Sur une fiche de lecture, la fillette devait entourer le mot "chat" chaque fois qu'elle le voyait. Elle commença. Elle entoura correctement 3 ou 4 mots "chat". Puis transgressant la consigne qui sans doute l'angoissait en l'empêchant de tout remplir, elle se mit à entourer d'autres mots.

-Dominique: Arrête! Regarde! Est-ce que c'est chat, ce mot? 

-La fillette : Non.
  

-Dominique : Tu vois tu t'es trompée. Fais attention.
   

-La fillette : (se remettant avec frénésie et un plaisir évident à entourer au hasard) : Trop tard!
   

 

Me revient encore en mémoire une autre histoire de "trop tard". C'était peu de temps après la mort de mon père. Toute sa vie, sans avoir été un bouffeur de curé, mon père avait affiché son scepticisme quant à la religion.       

Quand il mourut la question ne se posa même pas et il fut enterré civilement. Quelques jours après l'enterrement, mon frère me dit qu'il n'était pas sûr que notre père finalement n'aurait pas souhaité "passer par l'église". Avec une sorte de jubilation qui m'étonna moi-même, je lui répondis: "trop tard!"


Tnouveaurop tard! Trop tard! Trop tard! Tous ces "trop tard" qui, tous, punissent : autopunition du bègue, punition de celle qui avec sa fiche lui créait l'angoisse pour la fillette, punition posthume de ce père avec lequel les relations n'avaient pas toujours été simples. J'ai le sentiment qu'autrefois le "trop tard" avait la banale légèreté d'une simple notation temporelle. Le temps faisait des boucles et paraissait arrêté. On n'était jamais vraiment trop tard. On se répétait parce que le temps se répétait et on avait plaisir à se répéter : on faisait ce qu'avait fait son père, on avait plaisir à faire aujourd'hui ce qu'on avait fait hier et il était rassurant de penser qu'on le ferait encore demain et que d'autres après nous le feraient aussi. C'était des fines modulations de la répétition que venait le plaisir. Répéter avait le goût du bonheur. 

Aujourd'hui trop tard, trop tard pour tout. Trop tard pour inventer ce qui a déjà été inventé, dire ce qui a déjà été dit, faire ce que des millions d'autres avant nous ont déjà fait. Trop tard! Trop tard! Faire du neuf. Nouveau Roman, Nouvelle Vague, Nouvelle Economie, Nouveaux Philosophes, Nouveaux Riches et Nouveaux Pauvres. Seule la nouveauté a sens et valeur et nous pauvres déboussolés nous nous essoufflons à courir après des trains que nous loupons les uns après les autres. Trop tard! Trop tard!

Hervé Mesdon